Tribune
La proposition de loi dite de « sécurité globale », déposée par la majorité gouvernementale, entend interdire la diffusion, par tous moyens, de l’image d’un policier, d’un gendarme ou d’un militaire en opération, dans le but de porter atteinte à leur intégrité physique ou psychique. Ce texte est une réponse clientéliste du ministère de l’Intérieur à la plupart des syndicats de police. La protection des forces de l’ordre, nécessité indéniable dans une société démocratique, est déjà assurée dans le code pénal et la loi de 1881, qui sanctionnent le cyberharcèlement, la provocation à la commission d’un crime ou d’un délit et les menaces de commettre un délit ou un crime. Seuls les moyens mis en œuvre contre ces infractions doivent être renforcés pour protéger les forces de l’ordre.
Le nouveau délit instauré par cette proposition de loi a pour objectif réel de restreindre le droit des journalistes et la liberté de la presse de manière disproportionnée par rapport à la réalité de la menace, non étayée par les promoteurs de ce texte. Il permettrait d’interpeller tout journaliste qui filme en direct une opération de police, de le placer en garde à vue et de l’envoyer devant un tribunal en saisissant son matériel professionnel. Seul le tribunal sera à même de déterminer si l’intention malveillante est établie. Le mal serait déjà fait.
Ce texte vise également à empêcher la révélation d’affaires de violences policières illégitimes, souvent dissimulées par la hiérarchie des fonctionnaires en cause, comme ce fut le cas dans les affaires de Geneviève Legay et de Cédric Chouviat. Nous, syndicats et associations de défense des journalistes et des droits de l’Homme appelons à une suppression pure et simple de cet article et, si ce n’est pas le cas, nous nous y opposerons avec la plus grande fermeté pour protéger la liberté de la presse. Nous appelons le ministère de l’Intérieur et le groupe parlementaire de La République en Marche à ouvrir enfin une concertation avec les représentants des journalistes.
Paris, le 8 novembre 2020.
Premiers signataires :
LDH – SNJ – SNJ-CGT – CFDT-Journalistes – Fédération internationale des journalistes – Fédération européenne des journalistes – SGJ-FO.
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A lire également: la tribune cosignée par le SNJ-CGT « Cachez ces violences policières que je ne saurais voir », publiée sur le site de « Libération ».