Violences policières contre les journalistes : la honte de la France

0  -  Article mis à jour le 15 janvier 2020

Communiqué du SNJ-CGT

Une fois de plus, une fois de trop, les manifestations d’hier contre le système de retraites par points ont été l’occasion de violences inacceptables des forces de l’ordre contre des journalistes.

A Paris, Jean Ségura, du collectif Reporters en colère, a été violemment interpellé alors qu’il photographiait une charge de la police contre des manifestants, rue Saint-Lazare. A l’heure où ce communiqué est rédigé, il est toujours en garde à vue.

Le SNJ-CGT appelle à participer au rassemblement de soutien, ce vendredi 10 janvier à 15h, devant le commissariat du 10e arrondissement (14, rue de Nancy).

A Paris également, un photographe de l’agence Line Press, clairement identifié, a été arrêté. Un autre, travaillant pour Brut, l’a été… pour port de masque à gaz, qualifié sans rire par un syndicat de commissaires de police de « matériel de guerre », dont « l’acquisition et la détention sont prohibées ».

Un autre souffre d’une fracture ouverte à la main, à cause d’un coup de matraque.

A Toulouse, deux journalistes ont été frappés par des policiers « voltigeurs ». Un troisième a été touché au genou par une grenade lacrymogène, menacé d’un LBD à quelques centimètres du visage, insulté et a failli se faire saisir son appareil photo.

A Lille, une étudiante de l’ESJ Académie a reçu un coup de matraque au visage.

Malheureusement, cette liste de méfaits est probablement incomplète. Le collectif Reporters en colère mène d’ailleurs un travail de recensement, via un questionnaire en ligne.

Ces atteintes à la liberté d’informer sont intolérables, indignes d’un pays censé être un Etat de droit. Elles doivent cesser immédiatement car informer n’est pas un délit, photographier ou filmer les forces de l’ordre non plus, que l’on soit journaliste ou non.

Que faut-il à Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, pour enfin ouvrir les yeux ? Le SNJ-CGT exige qu’il donne des consignes claires aux forces de l’ordre pour laisser, tout simplement, les journalistes exercer leur métier.

Interpellé sur « les conditions de libre exercice du métier de journaliste lors de manifestations » et les « dérapages inadmissibles de la part de certaines forces de l’ordre » par le sénateur communiste Pierre Laurent, le ministre de l’Intérieur a publié, fin décembre, une réponse inquiétante.

Il répond d’abord à côté de la plaque : « Dans le feu de l’action, quand bien même [les journalistes] seraient porteurs d’un élément d’identification “Presse”, il faut que celui-ci soit suffisant visible et explicite pour que les forces de l’ordre puissent les identifier comme tels. » D’une part, les journalistes qui couvrent les manifestations, en particulier les photographes et les JRI, les plus exposés aux violences policières, arborent des signes distinctifs sans équivoque. D’autre part, en quoi ne pas être journaliste ou mal identifié comme journaliste justifierait d’être victime de violences policières ?

Christophe Castaner dévoile ensuite sa conception toute personnelle des conditions dans lesquelles doit s’exercer le métier de journaliste, « en s’identifiant par une prise de contact direct avec les forces de l’ordre » et « en se positionnant en marge des manifestants, à l’abri des violences qu’ils peuvent exercer et des munitions employées en conséquence lorsque les sommations sont faites, ou éventuellement derrière les forces de l’ordre ».

Mieux, ou pire : « Il doit également être souligné la politique d’ouverture et de communication des forces de l’ordre. […] Des chargés de communication des forces de sécurité intérieure peuvent par exemple être désignés. Ils encadrent et assurent la protection des médias pour lesquels un reportage en immersion a été validé. […] Ce type d’action témoigne de la volonté de transparence, d’information et de pédagogie des forces de l’ordre. La modernisation des moyens de communication tend par ailleurs à appuyer ces échanges en développant la présence de journalistes embarqués et en améliorant leur immersion dans des actions de gestion de l’ordre public. »

Bref, pour Christophe Castaner, un bon journaliste est un journaliste qui réalise des reportages autorisés par les forces de l’ordre et adopte leur point de vue.
Monsieur le ministre, le SNJ-CGT a une toute autre conception de la mission d’information des journalistes et des conditions de liberté dans lesquelles elle doit être exercée.

Montreuil, le 10 janvier 2020

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