Communiqué du SNJ-CGT de France Télévisions
C’est la victoire du droit sur la confusion. Le droit et la liberté des journalistes que le SNJ-CGT a choisi de défendre. La confusion que la direction de France télévisions a tenté de transformer en règle, pour faire régner l’arbitraire et le fait du prince.
Le 25 juin dernier, le SNJ-CGT, défendu par M° Dufresne-Castet, a gagné en appel contre France télévisions, qui voulait imposer des restrictions exorbitantes aux journalistes dans le cadre des campagnes électorales. Accompagnés par le syndicat Sud en première instance, nous avons été déboutés le 5 mars et avons continué seuls la procédure.
Depuis le début, le SNJ-CGT s’oppose aux dispositions d’une note de la direction intitulée « Articulation entre fonctions au sein de France Télévisions et mandat électoral », qui précise les limites de l’exercice du métier de journaliste, lorsque l’on est candidat à un mandat électoral ou bien élu maire ou conseiller municipal.
En fait de limites, elle musèle les journalistes qui légitimement voudraient participer à la vie démocratique de leur commune, et fait un traitement discriminatoire entre catégories de journalistes, l’encadrement ayant pratiquement le champ libre pour continuer à exercer ses fonctions.
Sciemment, la direction fait une confusion entre sujets politiques et sujets non politiques, en interdisant dès le début de la campagne électorale à un journaliste de signer tout type de reportage, le mettant de fait au chômage technique.
Elle confond soutien explicite et conjoint d’un candidat, comme si le fait d’être lié par le mariage ou simplement en concubinage impliquait que l’on ait les mêmes opinions politiques. Conception totalement archaïque du couple !
Elle met sur le même plan les journalistes élus maire d’un village de 200 habitants et ceux qui sont à la tête d’une commune de plus de 3500 habitants.
Elle entretient le flou entre charte éthique et règlement intérieur, qui n’ont pas le même régime de sanctions.
Tout cela ne relève pas du hasard. Semer la confusion dans les esprits est une stratégie de pouvoir bien connue.
On pourrait même se demander si, dans le contexte du renouvellement de la présidence de France Télévisions, cette note n’est pas un signal envoyé au pouvoir par la direction de l’entreprise, pour faire savoir qu’elle « tenait ses journalistes ».
Ainsi, s’appuyant sur cette note, la direction de France 3 a interdit à un journaliste de Lille tout type d’article sur le web, même sous pseudonyme. A Montpellier, une présentatrice historique a été exclue du débat du deuxièmetour sous prétexte que son mari avait été mandataire financier d’une liste qui n’a même pas dépassé le 1er tour.
En revanche, un rédacteur en chef adjoint de la même station, chargé de l’animation des débats a pu continuer de travailler alors qu’il était candidat. Son nom a tout simplement été retiré du générique. Ni vu ni connu !
En tirant les conséquences de cette note, un journaliste élu maire d’une petite commune rurale perd littéralement le droit d’exercer son métier pour une durée de 6 ans. Alors qu’un rédacteur en chef, par ailleurs maire d’une commune de plus de 3500, n’a qu’à informer son N+1 lorsqu’un sujet sur sa circonscription passe à l’antenne. Il n’a aucune démarche à faire si un sujet sur une autre circonscription que la sienne est diffusé dans son journal, même s’il donne la parole à un élu du même bord politique. Il y a là un risque de collusion entre journalisme et politique, qui ne semble pas troubler la direction de l’information.
Qu’on ne s’y trompe pas, le SNJ-CGT défend avec vigueur la déontologie de la profession, mais contre le confusionnisme ambiant, nous rappelons ces deux principes : tout salarié a droit à une vie personnelle dans laquelle l’employeur n’a pas à mettre son nez ; les journalistes sont des citoyens comme les autres, qui sont certes tenus par des règles de neutralité dans leur métier, mais ne doivent pas être totalement privés de l’exercer.
Les règles antérieures à cette note suffisaient amplement. Elles prévoyaient pour les journalistes candidats :
– l’utilisation d’un pseudonyme jusqu’au deuxième tour, pour les sujets antenne comme pour le web.
– l’interdiction de présenter toute émission jusqu’au soir du deuxième tour.
– l’interdiction de faire des sujets politiques pendant la campagne et pendant l’exercice d’un mandat en cas d’élection.
La victoire en appel du SNJ-CGT confirme également une règle de droit défendue par notre avocate, à savoir que cette note apporte bien une modification au règlement intérieur, et comme telle, elle aurait dû faire l’objet d’une consultation préalable des élu(e)s du CSE.
Même si ce jugement en appel ne se prononce pas sur le fond du dossier, il met un coup d’arrêt aux tentatives de la direction de restreindre les libertés des journalistes et conforte le SNJ-CGT dans ses prises de position. Faire passer le cadrage des journalistes pour des règles déontologiques est une façon déguisée de mettre au pas les rédactions. Nous nous y opposerons !
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