ANI Santé au travail : la CGT ne signera pas

0  -  Article mis à jour le 7 janvier 2021

Communiqué de la CGT

Après consultation de ses organisations, la CGT n’apposera pas sa signature au bas de l’accord national interprofessionnel intitulé : « Pour une prévention renforcée et une offre renouvelée en matière de santé au travail et conditions de travail ».

Les organisations de la CGT ont analysé l’accord et constatent que celui-ci ne renforce en aucun cas la prévention de la santé au travail des travailleurs. Les organismes et institutions de santé au travail n’y trouvent pas d’évolution positive en matière de capacité d’action et d’indépendance qui permettrait une véritable mise en œuvre d’une politique de prévention en santé.

Le patronat vise à chaque négociation à transférer sur les salariés ou d’autres acteurs ses propres obligations.

La CGT ne peut accompagner la dégradation des droits et moyens d’action des travailleurs sur leurs conditions de travail et leur santé. Ceci dans un contexte, à l’instar de l’ANI télétravail, où la ligne politique du patronat vise à chaque négociation à transférer sur les salariés ou d’autres acteurs – comme ici les services de santé au travail – ses propres obligations.

La possibilité de transfert de missions de la médecine du travail vers la médecine de ville ne sera pas une solution pour remédier à la pénurie de médecins du travail

La possibilité de transfert de missions de la médecine du travail vers la médecine de ville ne sera pas une solution pour remédier à la pénurie de médecins du travail. Pire, elle risque d’accroître les difficultés en faisant peser de nouvelles contraintes sur notre système de soin qui est déjà en difficulté. Pour être en capacité de jouer pleinement son rôle, la médecine du travail doit être dégagée de tout lien avec les employeurs pour ne pas avoir à opposer la préservation de la santé des travailleurs et les contraintes de productions imposées par les stratégies des entreprises.

Il y a risque de transfert de responsabilité de l’employeur vers le service de santé au travail.

La proposition de loi initiée par la députée Lecocq aggrave la portée de ce texte et augmente le risque d’un transfert de responsabilité de l’employeur au service de santé au travail. L’accès des informations de santé des médecins du travail issues de la médecine de ville par l’intermédiaire du Dossier Médical Partagé ouvre la porte à un jugement des habitudes de vie des travailleurs et leur impact sur leur santé au travail, voire leurs performances au travail. Ce n’est pas ainsi que la santé au travail doit s’intégrer dans les politiques de santé publique.

Cet accord et cette proposition de loi ne répondent pas aux réalités vécues par les salariés. L’enjeu se situe autour du travail et de son impact sur la santé des travailleurs mais aussi sur la santé publique et environnementale.

L’essentiel est la prévention primaire et une réelle possibilité pour les travailleurs d’agir sur l’organisation de leur travail.

Cet accord et ce projet de réforme passent à côté de l’essentiel : la prévention primaire et une réelle possibilité pour les travailleurs d’agir sur l’organisation de leur travail pour qu’il ait du sens et une utilité. Le patronat s’obstine à refuser l’intervention des salariés dans l’organisation du travail alors qu’ils en sont les premiers experts.

Trop de salariés sont en souffrance pour de multiples raisons. Ils sont à la recherche d’un emploi (les privés d’emploi sont particulièrement exposés aux risques en matière de santé mentale et sociale). Leur précarité, leur statut ou absence de statut, CDD, intérim, saisonniers mais, aussi, travailleurs des plateformes, par exemple, les exposent aux risques les plus élevés. L’organisation du travail et son orientation vers la maximisation des profits n’ont pas de sens et les injonctions sont contradictoires. La charge de travail et/ou l’intensification du travail qui augmente avec un débordement de la vie professionnelle sur la vie privée. L’individualisation des salaires et des carrières et la destruction des collectifs de travail.

La CGT a des propositions sur ces enjeux avec des nouveaux droits pour les salariés :

  • un droit de retrait mieux protégé ;
  • le droit de refus, d’alerter les autorités et la population en cas de pratiques dangereuses pour la santé de la population et pour l’environnement ;
  • le droit de stopper une réorganisation ou restructuration dangereuse pour la santé ;
  • le droit d’être représenté syndicalement même pour les salariés des TPE et PME au sein d’un Comité d’Hygiène de Santé et de Condition de Travail (CHSCT) ; celui-ci gagnant aussi des compétences sur les impacts environnementaux de l’activité de l’entreprise ;
  • la traçabilité des expositions aux risques et un meilleur suivi médical des salariés ;
  • une amélioration de la reconnaissance des maladies professionnelles et des accidents du travail ;
  • les Services de Santé au Travail et la médecine du travail doivent être rattachés à la Sécurité sociale pour la mise en œuvre d’une grande politique de santé au travail en toute indépendance ;
  • la France est un mauvais élève de la santé au travail et il est urgent que l’on ratifie les conventions de l’OIT qui concernent la santé au travail.

Les organisations de la CGT ont jugé que cet accord constituait une véritable régression sociale et une réelle atteinte à la possibilité des travailleurs de se sentir protégés au travail. Considérant que la santé des travailleurs ne peut être une variable d’ajustement, la CGT pèsera sur les débats parlementaires notamment en interpellant les élu.e.s de l’Assemblée Nationale et du Sénat.

Montreuil, le 5 janvier 2021.

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