Radio France: le forfait jours, une très mauvaise idée!

0  -  Article mis à jour le 4 février 2025

Communiqué du SNJ-CGT de Radio France

Quelques jours après une nouvelle attaque de la Cour des comptes contre nos congés, soi-disant pléthoriques, mais en omettant comme toujours de préciser que nous ne bénéficions pas des jours fériés et travaillons bien souvent au-delà de 40 heures par semaine, qui plus est pour certain.es en horaires décalés, la direction de Radio France a annoncé qu’elle voulait s’en prendre, elle aussi, à ses propres journalistes. Lors d’un récent CSE, elle a annoncé vouloir instaurer le forfait jours (Cf. encadré ci-dessous).



Nous voyons bien l’intérêt qu’il y aurait pour la direction:

  • Harmoniser nos conditions sociales avec celle de nos confrères de France Télévisions, passés en partie au forfait jours depuis 2013, en vue du dangereux projet de holding dans lequel le gouvernement Bayrou s’obstine
  • Tenter sans doute, au passage, de diminuer nos congés ou RTT, comme le préconise la Cour des comptes, au prétexte de réduire la précarité.

Effectivement, faire travailler davantage les journalistes en CDI réduirait automatiquement le nombre et la durée des contrats de piges ou de CDD, mais au détriment des journalistes non-titulaires. Belle façon de réduire leur précarité que de les mettre au chômage!

Effectivement, faire travailler davantage les journalistes en CDI réduirait automatiquement le nombre et la durée des contrats de piges ou de CDD, mais au détriment des journalistes non-titulaires. Belle façon de réduire leur précarité que de les mettre au chômage!

Qu’est-ce que le forfait jours?

  • Le forfait jour a été créé en 2000 par la loi Aubry II, principalement pour les cadres disposant d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps.
  • C’est une organisation qui compte le temps de travail en jours par an et non plus en heures par semaine. Les salariés auxquels il s’applique ne sont donc pas soumis au respect des durées quotidiennes et hebdomadaires du temps de travail (35h). 


  • Le respect des temps de repos entre les jours travaillés peut-être réduit au minimum légal (11 heures de repos entre deux journées, repos hebdomadaire de 35h). 


  • La mise en place du forfait jour nécessite un accord collectif dans l’entreprise ou la branche et un accord individuel du salarié (avenant au contrat ou clause du contrat de travail) qui a donc en théorie le choix. En pratique à France Télévisions, par exemple, les contrats postérieurs à l’entrée en vigueur du forfait jour l’incluent systématiquement, les nouveaux embauchés n’ont donc pas vraiment le choix… 

  • Le nombre de jours travaillés par an, fixé dans l’accord collectif, peut-être de 218 jours maximum ou inférieur (à France Télévisions, c’est 197 jours par an). 


  • L’employeur a obligation de mettre en place des dispositifs pour s’assurer régulièrement que la charge de travail est raisonnable et que l’équilibre entre travail et vie personnelle est satisfaisant (disposition très diversement appliquée…).

Pour les journalistes, quel est donc l’intérêt d’accepter le forfait jours?

La direction fera sans doute miroiter une augmentation de salaire pour celles et ceux qui feraient ce choix. A France Télévisions, cette augmentation n’a été que de 5% au total, l’équivalent de nos promotions pécuniaires. Le jeu en vaut-il la chandelle? 


Ce « forfait jours » n’est pas véritablement adapté à notre métier: il a été conçu pour les cadres totalement libres de leur emploi du temps. C’est loin d’être notre cas.

D’autre part, ce « forfait jours » n’est pas véritablement adapté à notre métier: il a été conçu pour les cadres totalement libres de leur emploi du temps. C’est loin d’être notre cas. Nous sommes soumis aux aléas de l’actualité, aux demandes de nos rédacteurs en chef ou chefs de service, aux horaires collectifs de nos rédactions, à des plannings, au rythme des différentes conférences de rédaction et des journaux dans lesquels nous devons intervenir, souvent en direct.

Nous avons donc toutes les raisons de nous méfier d’un dispositif dont la tendance est de générer des durées du travail plus importantes pour les salarié·es concerné·es, selon une étude de la Dares. Un dispositif également plusieurs fois condamné par le Comité européen des droits sociaux (CEDS) parce qu’il autorise une durée excessive du travail hebdomadaire sans garanties suffisantes. 



Nous avons toutes les raisons de nous méfier d’un dispositif dont la tendance est de générer des durées du travail plus importantes.

Un journaliste ne compte pas ses heures, a-t-on l’habitude de dire. Ne faudrait-il pas plutôt remettre en cause cet adage? En faisant disparaître un peu plus encore la notion d’horaires de travail, le forfait jours peut surtout être un très bon moyen d’avaliser et d’invisibiliser le fait qu’aujourd’hui, beaucoup d’entre nous travaillent au-delà de leurs horaires légaux, sans forcément prendre de récupérations, ce qui peut provoquer de la souffrance au travail et générer des risques psychosociaux. Un travail d’abattage journalistique qui n’est gage ni de qualité ni même de productivité. 


Un journaliste ne compte pas ses heures: ne faudrait-il pas remettre en cause cet adage?

Même si nous ignorons pour l’instant les intentions précises et détaillées de la direction, nous savons par l’exemple d’autres médias que le passage au forfait jours pourrait aussi avoir des conséquences sur le décompte et la rémunération des heures de nuit et faire tomber l’accord sur les astreintes.



Quoi qu’il en soit, pour que le forfait jours s’applique, il faut impérativement un accord. La direction ne peut l’imposer de façon unilatérale.

Pour le SNJ-CGT c’est clair: nous ne sommes pas demandeurs!

Paris, le 4 février 2025.

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