La notion de faute
Constitue une sanction toute mesure prise par l’employeur à la suite d’un agissement considéré par lui comme fautif (L. 1331-1 du Code du travail). Il est donc nécessaire que les faits soient fautifs pour que la sanction soit justifiée. Il n’existe pas de définition légale de la faute.
Une faute correspond notamment à :
- Un manquement aux règles de discipline et d’organisation collective du travail intégrées dans le règlement intérieur mais également aux obligations découlant du lien de subordination.
- Un manquement à l’obligation de loyauté.
- L’exécution défectueuse de la prestation de travail due à une abstention volontaire du salarié ou à sa mauvaise volonté délibérée.
- Les injures, menaces et violences.
Il faut souligner que l’insuffisance professionnelle et l’insuffisance de résultat ne sont pas des fautes.
La faute peut être légère, sérieuse, grave (lorsqu’elle cause des troubles sérieux et rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise) ou lourde (faute d’une extrême gravité, révélant l’intention de nuire d’un.e salarié.e à l’employeur ou à l’entreprise).
Depuis le 1er janvier 2020, le règlement intérieur est obligatoire dans les entreprises ou établissements employant au moins 50 salarié.e.s pendant 12 mois consécutifs (L. 1311-2 du Code du travail).
Il fixe notamment les règles générales et permanentes relatives à la discipline ainsi que la nature et l’échelle des sanctions. Il énonce également les dispositions relatives aux droits de la défense des salarié.e.s et rappelle les dispositions protectrices en faveur des victimes et des témoins de harcèlement sexuel, moral et aux agissements sexistes.
Caractéristiques des sanctions
L’employeur est libre du choix de la sanction, sous réserve d’appliquer une sanction prévue par le règlement intérieur lorsque celui-ci est obligatoire et de respecter les règles de la convention collective.
La sanction disciplinaire doit être proportionnée à la faute commise. À l’exception de l’avertissement, elle est de nature à affecter – immédiatement ou non – la présence du.de la salarié.e dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.
L’appréciation de l’employeur est soumise au contrôle du juge qui apprécie le caractère fautif des faits ainsi que la proportionnalité de la sanction.
Les sanctions interdites
Sont interdites :
- les amendes et autres sanctions pécuniaires (L. 1331-2 du Code du travail) ;
- les sanctions prises en raison d’un critère discriminatoire, direct ou indirect (L. 1132-1 du Code du travail) ;
- les sanctions prises à l’encontre d’un.e salarié.e victime ou témoin de harcèlement sexuel ou moral (L. 1152-2 et L. 1153-3 du Code du travail) ;
- les sanctions qui font suite à l’exercice par le.la salarié.e d’un droit (droit de retrait pour danger grave et imminent, droit de grève, droit syndical etc) ;
- les sanctions pour des faits déjà sanctionnés : l’employeur ne peut pas sanctionner deux fois la même faute.
Procédure
Aucune sanction ne peut être prise à l’encontre d’un.e salarié.e sans qu’il.elle soit informé.e, dans le même temps et par écrit, des griefs retenus contre lui.elle.
- Convocation à un entretien préalable
Avant de prendre une sanction, autre qu’un avertissement ou une sanction de même nature, l’employeur doit convoquer le.la salarié.e à un entretien préalable en précisant l’objet, la date, l’heure et le lieu de l’entretien.
La convocation rappelle que le.la salarié.e peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise.
Elle est soit remise contre récépissé, soit adressée par lettre recommandée (L 1332-2, R. 1332-1 du Code du travail).
- Entretien préalable
Lors de l’entretien, l’employeur indique les motifs de la sanction envisagée et recueille les explications du.de la salarié.e. Lorsque la sanction n’est pas un licenciement, aucun délai n’est fixé entre la convocation et l’entretien : un délai suffisant doit être respecté pour permettre au.à la salarié.e de préparer sa défense. Le.la salarié.e n’est pas obligé.e de se rendre à l’entretien.
- Délais pour notifier la sanction
La sanction ne peut intervenir :
- moins de deux jours ouvrables,
- ni plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien. Le délai débute à compter de la convocation à entretien.
Elle est motivée et notifiée à l’intéressé.e, soit par lettre remise contre récépissé, soit par lettre recommandée (L. 1332-2 et R. 1332-2 du Code du travail).
- Procédure spécifique
Si la sanction encourue est le licenciement, c’est la procédure propre au licenciement pour motif personnel qui doit être respectée (cf. fiche sur le licenciement pour motif personnel).
- Période d’essai
La procédure disciplinaire doit être respectée lorsqu’une faute est invoquée à l’encontre d’un.e salarié.e en période d’essai, même si l’employeur peut mettre fin à la période d’essai sans formalité.
- Principes applicables
Plusieurs principes sont applicables en matière de droit disciplinaire :
- Le principe de légalité des sanctions : le règlement intérieur doit établir la nature et l’échelle des sanctions lorsque celui-ci est obligatoire (L. 1321-1 du Code du travail).
- Le principe de non bis in idem : il est interdit de sanctionner deux fois un.e salarié.e pour un même fait fautif.
Néanmoins, en cas de récidive, l’existence d’une précédente sanction peut être retenue comme élément d’appréciation.
L’employeur ne peut pas annuler la sanction prononcée à un.e salarié.e pour lui imposer une sanction plus sévère pour les mêmes faits.
- Le principe du contradictoire : le.la salarié.e doit être convoqué.e à un entretien préalable, au cours duquel l’employeur recueille les explications du.de la salarié.e.
- Le principe de proportionnalité : un tel principe doit être respecté entre la faute et la sanction.
- Le principe de transparence : une sanction disciplinaire doit être écrite, motivée et notifiée au.à la salarié.e (L. 1332-2 du Code du travail).
La rétrogradation
Il faut distinguer l’offre de rétrogradation de la rétrogradation définitive :
- L’offre de rétrogradation n’est pas une sanction car elle est soumise à l’acceptation du.de la salarié.e. En cas de refus, l’employeur peut prendre une autre sanction.
- La rétrogradation acceptée par le.la salarié.e constitue une sanction disciplinaire.
La mise à pied conservatoire
La mise à pied conservatoire est une suspension du contrat de travail imposée par l’employeur lorsque les faits reprochés ont rendu indispensable une telle mesure conservatoire. Aucune sanction définitive relative à ces faits ne peut être prise sans que la procédure précitée ait été respectée (L.1332-3 du Code du travail).
La mise à pied conservatoire se distingue de la mise à pied disciplinaire : la première est une mesure d’attente, prononcée dans l’attente d’une décision disciplinaire définitive, alors que la seconde constitue une sanction disciplinaire et a un caractère définitif.
La contestation d’une sanction
Dans tous les cas (même à la suite d’un avertissement), le.la salarié.e a tout intérêt à présenter ses explications à l’employeur, par écrit ou par l’intermédiaire des représentant.e.s du personnel.
Si le.la salarié.e s’estime injustement ou trop lourdement sanctionné.e, il.elle peut saisir le conseil de prud’hommes.
Celui-ci est, en effet, seul compétent pour apprécier :
- la régularité de la procédure disciplinaire ;
- la qualification du fait fautif qui justifie la sanction ;
- la proportionnalité de la sanction au fait fautif.
Il peut annuler la sanction, sauf s’il s’agit d’un licenciement pour lequel d’autres règles sont applicables. L’annulation peut intervenir en présence d’une sanction irrégulière en la forme, injustifiée, ou disproportionnée à la faute commise (L. 1333-2 du Code du travail).
La charge de la preuve repose sur l’employeur. Si un doute subsiste, il profite au.à la salarié.e (L. 1333-1 et s. du Code du travail).
Le délai de prescription
Aucun fait fautif ne peut à lui seul donner lieu à sanction, passé un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, sauf en cas de poursuites pénales (L.1332-4 du Code du travail).
Deux limites :
- L’employeur peut prendre en considération un fait antérieur lorsque le comportement fautif se poursuit.
- Les poursuites pénales interrompent la prescription (L. 1332-4 du Code du travail).
De même, aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l’engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoquée à l’appui d’une nouvelle sanction (L. 1332-5 du Code du travail).
Pour en savoir plus, consultez la fiche Droit disciplinaire