Décès de Marcel Lorre

0  -  Article mis à jour le 28 août 2017

Notre camarade Marcel Lorre est décédé dans la nuit du 25 au 26 juillet 2016, à son domicile de Saint-Benoit-du-Sault (Indre). Il a été découvert mort dans son lit par l’assistante ménagère qui assurait l’entretien de la maison. Mort naturelle, selon la gendarmerie et le médecin appelés sur les lieux. Il a été incinéré deux jours plus tard au columbarium de Châteauroux. Ses cendres ont été remises à sa famille. Il avait 67 ans.

Marcel Lorre était une figure de ce petit monde parisien du photojournalisme free-lance qui travaillait plus particulièrement sur les thèmes de la vie populaire ouvrière et syndicale. Les grèves, les journées d’action et les grandes manifestations, mais aussi les ambiances et les gestes quotidiens dans les entreprises et les services publics. Il avait notamment publié dans La Vie Ouvrière et les publications de la CGT. Il avait suivi à ses débuts professionnels, dans les années 1965-1970, la longue lutte des mineurs du Massif Central, de Decazeville (Aveyron) à Alès et la Grand-Combe (Gard). Il avait aussi travaillé pour L’Humanité et pour Economie et Politique, la revue spécialisée du Parti communiste.

C’est d’ailleurs L’Huma qui lui avait ouvert les portes du photojournalisme. Par la petite porte : jeune cheminot en apprentissage, il était devenu correspondant du quotidien, qui avait à l’époque un réseau dense d’informateurs dans les entreprises. Vite remarqué par le service photo pour la qualité à la fois informative et esthétique de ses clichés, il avait, peu après ses vingt ans, décidé de sauter le pas du photojournalisme. L’époque était alors propice au journalisme indépendant. En juillet 1974, la loi Cressard dotait enfin les pigistes d’un véritable statut professionnel.

Pour Marcel Lorre, l’adhésion au SNJ-CGT allait de soi, la prise de responsabilités également . Il accéda vite au Comité national. Il fut alors un des membres de la commission pigistes, qui travaillait alors à faire entrer la loi Cressard dans les faits, face à des employeurs dont beaucoup saisissaient tous les subterfuges pour en éviter la mise en pratique chez eux.
Au SNJ-CGT, comme à l’ANJRPC (Association nationale des journalistes reporters photographes et cinéastes), dont il était aussi membre, les rapports n’étaient pas toujours simples. Non sur le fond ni sur la « ligne », mais le caractère éruptif de Marcel, et, on peut bien le dire, son incapacité à écouter les points de vue des autres, rendaient les échanges aléatoires, particulièrement dans les congrès.

En août 1992, surprise générale : Marcel, qui avait aux yeux de tous, la dégaine parfaite du titi parigot, décide de s’installer à la campagne. Saint-Benoit-du Sault, donc, bourg médiéval de 800 habitants, répertorié comme l’un des « plus beaux villages de France ». Il y trouve vite sa place, expose ses photos dans la mairie, se fait un tissu d’amitiés. Et, pour ne pas lâcher son monde, devient correspondant local du quotidien limousin L’Echo du Centre, l’un des trois quotidiens régionaux communistes, avec Liberté à Lille et La Marseillaise sur la Méditerranée. Il se fait une réputation locale, avant de se brouiller avec la direction sur un contentieux financier et de claquer la porte.

Survient alors un syndrome, parait-il, assez fréquent chez les passionnés d’informatique et de réseaux sociaux : il se bâtit sa société virtuelle, et se coupe progressivement de la société réelle qui l’entoure. Il sort de moins en moins de chez lui, sa forme physique se dégrade, il refuse de se soigner. Et cette dernière séquence du 26 juillet. Le souvenir de sa figure, attachante, irritante et parfois exaspérante, reste lié à trois décennies d’histoire du syndicat.

Georges Chatain

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