Barème de piges des reporters-photographes : un salaire indécent

0  -  Article mis à jour le 6 septembre 2017

Communiqué commun des organisations SNJ, SNJ-CGT, Journalistes-CFDT, SJ-CFTC, SNJ-FO, Union des Photographes Professionnels/Auteurs (UPP), SAIF et SCAM.

Il était temps : le Journal officiel du 10 mai a publié le décret fixant « les conditions de détermination du salaire minimum des journalistes professionnels auteurs d’images fixes rémunérés à la pige ». Les deux ministres signataires, Audrey Azoulay et Myriam El Khomri, ont attendu les derniers jours de leur mandat pour apposer leur paraphe, le gouvernement ayant démissionné le même jour. Ce décret, prévu par la loi Hadopi du 12 juin 2009 et dont le contenu est de la seule responsabilité des deux ministères, était en effet attendu depuis le 14 juin 2011.

Si les ministres successifs de la culture et de la communication ont fait preuve d’excès de prudence dans le traitement du dossier, c’est en raison de la volonté politique du gouvernement de ne pas s’opposer frontalement aux patrons de presse, qui ont usé de toute leur influence pour faire échec à une revendication des reporters-photographes exprimées lors des négociations sur les modalités de réutilisation des œuvres des journalistes. Les reporters-photographes, à la demande de leurs représentants, ne devant être soumis aux nouvelles règles fixées par la loi Hadopi qu’après la négociation d’un barème de piges.

Les nombreux patrons de presse, faisant un usage immodéré de photos libres de droits et souvent gratuites après avoir réduit les effectifs, n’entendent pas sortir des négociations de gré à gré lorsqu’ils sont contraints de faire appel à des reporters-photographes professionnels. Les reporters-photographes ont vu ainsi les commandes et leurs revenus diminuer drastiquement et, aujourd’hui, nombre d’entre eux ne répondent plus aux critères de détention de la carte d’identité de journaliste.

Le gouvernement a été sorti de son immobilisme après de multiples réunions, rapports, actions, communiqués, livre noir de la SCAM et autres interpellations à Perpignan et ailleurs. Mais le décret d’aujourd’hui, qui tourne le dos à nos revendications, ne répond pas aux attentes de la profession. En effet, la rémunération minimum pour une commande demandant cinq heures minimum de travail a été fixée par arrêté à 60€, soit l’équivalent d’un salaire mensuel brut de 1820€ ; mais pour arriver à ce salaire, le pigiste devrait avoir travaillé 30 jours, c’est-à-dire sans aucun jour de repos. Aujourd’hui la réalité est bien différente ; le pigiste n’arrive pas à enchaîner plus de quelques commandes, dans le meilleur des cas. Néanmoins, il doit continuer à investir dans des matériels (matériel photo, ordinateur et sauvegarde numérique sécurisée) entièrement à sa charge.

Enfin, il faut préciser que pour une commande de 60€, l’éditeur pourra réutiliser les photos dans les mêmes conditions que celles des œuvres des autres journalistes, sur Internet notamment. « Reventes » et « repasses » seront rémunérées dans les conditions fixées par un accord sur une « période dite d’actualité » définie par accord d’entreprise.

Assurément le compte n’y est pas : les reporters-photographes ne se sentent ni respectés, ni reconnus et ni payés au juste prix.

Les syndicats signataires, les organisations professionnelles et les sociétés d’auteur signataires de ce communiqué rejettent un tel montant et vont se rencontrer pour examiner les suites à donner à ce qu’ils considèrent comme une insulte non seulement à la profession mais aussi à une information de qualité.

Paris, le 12 mai 2017

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