Communiqué du SNJ-CGT de l’AFP
Le PDG Fries peut se targuer d’avoir commencé à tailler à vif dans les effectifs toutes catégories de l’agence avec son plan de départs volontaires (PDV) qui va affecter durablement et profondément le fonctionnement de la 3e agence mondiale d’information et les conditions de travail de son personnel. A observer aussi la pente dramatique de la politique rédactionnelle et les menaces sur l’indépendance technique, c’est bien l’avenir de l’AFP qui est désormais en jeu.
Tout se passe comme si la direction générale avait entrepris, avec le concours actif de la direction de l’Information et de quelques hiérarques zélés, de banaliser et normaliser l’AFP dans l’univers médiatique, en gommant ce qui fait sa spécificité depuis sa refondation il y a tout juste 75 ans. C’est, d’abord, l’alignement progressif sur le moins-disant rédactionnel. Le mot d’ordre, c’est aujourd’hui la «BFMisation» de l’AFP (du nom de la chaîne française dite d’info en continu, on le précise pour les collaborateurs en poste à l’étranger).
Les principes de base du métier sont peu à peu sapés: bouleversement de la hiérarchie de l’information au profit du spectaculaire et de l’image, valorisation outrageuse des «gens», l’info people, survalorisation des « tendances », des sujets légers prétendument porteurs, dans la même veine que le pipi du chien de Macron dans un salon de l’Elysée, encouragement à pratiquer le racolage par des leads de choc, à tirer le premier et à donner dans l’approximation parce que moins d’effectifs et toujours plus de travail, mise en avant des faits-divers.
La direction nous promet depuis des mois -bien avant que commencent les négociations sur le PDV- une réflexion sur une « nouvelle façon de travailler »avec moins d’effectifs. A l’heure où nous écrivons ces lignes, le personnel attend toujours les conclusions. La direction prévoit-elle de faire l’impasse sur des sujets -lesquels ?- au risque de ne plus proposer à nos clients une information complète et exhaustive?
Moins de personnel veut dire moins de terrain et moins de temps pour traiter une info.
Pour la CGT, une chose est sûre: moins de personnel veut dire moins de terrain et moins de temps pour traiter une info.Parallèlement, les projets de la Direction comme le tout vidéo ne constituent qu’une recherche vaine d’un nouvel Eldorado, alors que la vocation de l’AFP consiste à développer l’agence comme outil multimédia et multilingue à vocation mondiale.
AFP-Services ou quand l’AFP se vend
Deuxième axe de la banalisation de l’AFP, la confusion qui atteint un niveau gravissime entre information et communication, au nom de « la rentabilité de l’agence ». Dernière dérive en date: dans un publi-reportage, AFP-Services, filiale à 100% de l’agence, a vanté les mérites de Coca-Cola en matière écologique, alors que la firme US est l’un des plus gros pollueurs de la planète.
En avril dernier déjà, on avait eu droit à une interview exclusive de Pelé et Mbappé obtenue grâce au même AFP-Services à la condition que la mention de Hublot (groupe LVMH), sponsor des joueurs, figure dans la dépêche. Une couverture sponsorisée visible aussi sur le fil photo. Autant d’atteintes graves aux principes fondamentaux de l’AFP inscrits dans le statut de l’AFP régi par la loi.
Tout aussi grave, on commence à voir apparaitre sur des sites internet des dépêches d’agence signées AFP-Services! Comment mieux banaliser l’AFP que d’apporter des preuves qu’elle est désormais bien engagée dans la marchandisation du système médiatique tout entier?
De tels dérapages tombent sous le coup d’une saisine du Conseil supérieur de l’agence, en principe garant de son indépendance. Il est temps d’en revenir aux fondamentaux et de mettre un terme à ces liaisons dangereuses, comme Relax News. Le SNJ-CGT y veillera.
Moins d’emplois, plus de profit
75 ans après la création de l’AFP par un groupe de résistants journalistes boutant hors de la place de la Bourse les collabos, doit-on s’attendre à ce que l’agence soit dépecée, puis privatisée ?
Une chose est sûre, les commanditaires du plan Fries sont prêts à réduire les moyens financiers, techniques et humains de l’AFP.
Une chose est sûre, les commanditaires du plan Fries sont prêts à réduire les moyens financiers, techniques et humains de l’AFP. Avec le plan Fries, il y a plus de « volontaires » qui se déclarent prêts à quitter le navire par lassitude, du fait d’un manque de perspectives de développement, mais aussi en raison de la réduction de la voilure rédactionnelle (qui affecte même le nombre de journalistes expatriés, déjà amputé ces cinq dernières années).
Le secteur technique va payer le prix fort, mettant en danger l’outil technique, la bonne marche de la maison, voire son indépendance. Jusqu’ici, les directions successives de l’agence étaient obsédées par la « maîtrise » de la masse salariale. Il s’agit désormais ouvertement et pour la première fois de son histoire, de la faire baisser, et tant pis si cela a des conséquences négatives.
Le plan Fries n’en est qu’à ses débuts, c’est une spirale qui s’engage, le risque est grave d’un amenuisement progressif mais fatal de l’AFP. Les chiffres parlent d’eux-mêmes: chez les journalistes francophones 29 sont volontaires au départ sur 17 poste supprimés. Chez les PTA, il y aurait 38 départs. Le tout sur fond de salaires bloqués, de mises en cause des acquis et droits syndicaux (condamnations successives de l’AFP par la justice pour discrimination syndicale et autres).
Un déménagement carrément suspect
Pire ! la direction promet désormais des « sacrifices » sur les conditions de travail qui vont être fortement impactées par le rapatriement volontariste des personnels de la rue Vivienne vers la Place de Bourse, décidé uniquement pour des raisons financières et sans le début d’une réflexion rédactionnelle. Ce transfert va augmenter de 38% la population dans l’immeuble du siège (on passerait de 789 à 1 089 personnes). Là encore, on peut se demander si cette réunification ne cache pas un projet funeste visant à se séparer petit à petit de certains pans de l’agence (externalisation du technique?).
Il est vital pour l’avenir de l’AFP d’avoir des locaux à même de lui permettre de remplir sa mission, conformes à son rang et ses ambitions.
Un projet qui est exactement le contraire de ce que la direction prétendait faire avec le déménagement (se donner les moyens de développer dans un espace physique plus vaste les nouvelles activités vidéo, réseaux sociaux, etc.). Il est vital pour l’avenir de l’AFP d’avoir des locaux à même de lui permettre de remplir sa mission, conformes à son rang et ses ambitions.
Bien que le SNJ-CGT ait toujours soutenu le rapatriement de la rédaction dans un seul et même bâtiment, nous serons attentifs aux risques d’encombrement et de mauvaises conditions de travail engendrés par les travaux ! En cette période cruciale, le SNJ-CGT appelle chacune et chacun à être vigilant et de nous informer sur ce qui se passe ou se prépare dans vos services. Le personnel a besoin des syndicats, les syndicats ont besoin du personnel.
Paris le 11 septembre 2019
Contact :
Mariem Attietallah, Déléguée Syndicale SNJ-CGT AFP
Mariem.ATTIETALLAH@afp.com
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