Communiqué du SNJ-CGT
Réuni en Comité national ce 22 septembre, le SNJ-CGT dénonce les dispositions du Schéma national de maintien de l’ordre 2020, publié le 17 septembre par le ministère de l’Intérieur, dont certaines visent à encadrer, contrôler, voire empêcher l’exercice du métier de journaliste dans les manifestations.
Ce Schéma a été rédigé sans aucune concertation avec les syndicats de journalistes, qui ont pourtant à maintes reprises dénoncé des actes de violence des force de l’ordre à l’encontre des journalistes et des entraves à l’exercice de leur métier.
Ce Schéma a été rédigé sans aucune concertation avec les syndicats de journalistes, qui ont pourtant à maintes reprises dénoncé des actes de violence des force de l’ordre à l’encontre des journalistes et des entraves à l’exercice de leur métier. Ils ont publié des communiqués (lire notamment ici, ici, ici et là), interpelé le ministère de l’Intérieur et lancé des alertes auprès de la Plateforme pour renforcer la protection du journalisme et la sécurité des journalistes, mise en place par le Conseil de l’Europe.
Dans son rapport de 2020 (lire à la page 46), cette plateforme du Conseil de l’Europe écrit d’ailleurs que « sept des treize alertes publiées en 2019 concernant la France relevaient des violences ou des mesures de police agressives contre des journalistes couvrant les manifestations ». Le rapport précise : « Publiée pour la première fois en décembre 2018, une alerte relevant l’usage excessif de la force par la police lors de manifestations des « gilets jaunes » a été mise à jour cinq fois en 2019, alors que de nombreux journalistes ont été victimes de menaces ou d’agressions de la part des forces de l’ordre, certains ayant souffert des blessures telles que des fractures de la main, des côtes cassées et des blessures au visage. »
Le schéma de maintien de l’ordre français affiche de belles intentions, tel « l’exercice de la liberté d’expression et de communication » ou celle « d’assurer une prise en compte optimale des journalistes et de protéger ainsi le droit d’informer ». Mais il affirme aussi que « le délit constitué par le fait de se maintenir dans un attroupement après sommation ne comporte aucune exception, y compris au profit des journalistes ou de membres d’associations ». Il est ainsi des situations où, de la seule décision des forces de l’ordre, les journalistes n’ont plus le droit d’exercer leur métier pour rendre en compte des événements auxquels ils assistent. S’agirait-il d’en passer certains sous silence ?
Le SNJ-CGT refuse par ailleurs tout système d’« accréditation » des journalistes pour exercer leur métier dans une manifestation.
Autre disposition : « Un officier référent [parmi les forces de l’ordre, NDLR] peut être utilement désigné au sein des forces et un canal d’échange dédié mis en place, tout au long de la manifestation, avec les journalistes, titulaires d’une carte de presse, accrédités auprès des autorités. » Cela veut-il dire qu’il existe désormais deux catégories de journalistes parmi ceux qui couvrent les manifestations, ceux détenteurs de la carte de la presse et ceux – de plus en plus nombreux, notamment pour cause de précarité – qui n’en disposent pas ? Le SNJ-CGT refuse par ailleurs tout système d’« accréditation » des journalistes pour exercer leur métier dans une manifestation.
Cette « communication externe dynamique » ira-t-elle jusqu’à mettre des images à disposition des rédactions ?
Le schéma de maintien de l’ordre revendique également, une « communication externe dynamique » de la part des « porte-paroles du ministère et des directions opérationnelles ». Il précise en particulier que « la diffusion de photos des matériels dangereux saisis et d’images illustrant la réalité des violences contre les forces de l’ordre doit être encouragée ». Cette « communication externe dynamique » ira-t-elle jusqu’à mettre des images à disposition des rédactions ? Si tel est le cas, le SNJ-CGT rappelle que le journalisme ne se résume pas à diffuser des images prises par d’autres, sans connaître les conditions et le contexte des prises de vue. Un journaliste se doit d’enquêter, de collecter ses informations, les confronter, les hiérarchiser et les mettre en perspective.
Toujours aussi prompt à rendre service, le ministre de l’Intérieur propose généreusement « la réalisation d’exercices conjoints permettant aux forces d’intégrer la présence de journalistes dans la manœuvre et à ces derniers de mieux appréhender les codes et la réalité des opérations de maintien de l’ordre en environnement dégradé ». Il évoque aussi « des sensibilisations au cadre juridique des manifestations, aux cas d’emploi de la force et notamment aux conduites à tenir lorsque les sommations sont prononcées ». Il précise que « l’embarquement de journalistes au plus près des forces est également possible ».
M. Darmanin, les journalistes n’ont pas besoin d’interdictions injustifiées, d’« exercices » ou de « sensibilisations »… Laissez-les faire leur métier, la liberté de la presse et la liberté d’informer ne s’en porteront que mieux.
La publication de ce schéma de maintien de l’ordre intervient quelques jours après que le ministre de l’Intérieur a défendu « l’idée d’obliger les télés et les réseaux sociaux à ne pas diffuser les images des visages des policiers, mais de les flouter », un autre atteinte au travail et à la crédibilité des journalistes.
M. Darmanin, les journalistes n’ont pas besoin d’interdictions injustifiées, d’« exercices » ou de « sensibilisations »… Laissez-les faire leur métier, la liberté de la presse et la liberté d’informer ne s’en porteront que mieux.
Le SNJ-CGT vous demande de recevoir les syndicats de journalistes. Nous en profiterons pour vous remettre un exemplaire du « code de la liberté de la presse pour la police », présenté en janvier 2020 à Paris avec nos partenaires du Centre européen de la liberté de la presse et des médias (ECPMF) et de la Fédération européenne des journalistes (FEJ).
Montreuil, le 22 septembre 2020.
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Lire également le communiqué du SNJ-CGT de France Télévisions « Circulez y’a rien à voir ! »