Entretien réalisé par la FIJ
Au début de la guerre en Ukraine et des bombardements des grandes villes, la FIJ et la FEJ ont lancé un Fonds de sécurité spécial afin de venir en aide aux journalistes dans le besoin dans le pays, par le biais de leurs affiliés l’IMTUU et le NUJU. Elles soutiennent également les journalistes qui tentent de fuir la Russie. Ernest Sagaga est le responsable du département de la Sécurité et des Droits de l’Homme de la FIJ. Il nous explique les modalités d’utilisation des fonds recueillis et le travail de la FIJ et de la FEJ visant à soutenir les journalistes dans la région.
De nombreux journalistes dans le monde ont fait preuve d’une grande solidarité afin de venir en aide aux professionnels des médias dans le besoin en Ukraine. Quel type d’aide la FIJ a-t-elle reçu jusqu’à présent ?
Ernest Sagaga : Oui, nous sommes ravis de la solidarité dont ont fait preuve les journalistes, les citoyens et les institutions du monde entier. Depuis le lancement de notre opération pour l’Ukraine, nous avons reçu plus de 223 000 euros qui ont été versés sur notre Fonds de sécurité. Nous avons également reçu d’importants soutiens de manière directe de la part de l’UNESCO et d’autres organisations pour pouvoir acheter des équipements de sécurité et pour développer des formations en matière de sécurité.
Comment cette aide est-elle gérée ?
E. S. : L’aide est distribuée, en collaboration étroite entre la FIJ, la FEJ et nos affiliés en Ukraine (NUJU et IMTUU), en mettant l’accent sur les besoins des journalistes en matière de sécurité, tels que les équipements de protection individuelle (EPI), ainsi que sur la communication sécurisée. Une enquête exploratoire a été organisée afin d’analyser la situation des journalistes sur le terrain, déterminer les actions qui devaient être accomplies en priorité et définir la meilleure manière d’y parvenir. De plus, la possibilité d’instaurer des couloirs humanitaires en vue de relocaliser les journalistes à l’intérieur du pays et de les évacuer à l’extérieur du pays en cas de besoin a été examinée. À ce jour, les fonds récoltés ont permis d’acheter des EPI pour les journalistes, de financer le déménagement des bureaux des syndicats et de fournir des conseils en matière de sécurité aux journalistes. Nos affiliés ont également bénéficié de montants forfaitaires pour répondre aux besoins précis des journalistes sur le terrain. Par ailleurs, il est prévu de mettre en place des centres dans des régions sûres du pays afin de coordonner l’acheminement de l’aide à proximité des journalistes dans le besoin.
Quels sont les besoins essentiels des journalistes chargés de couvrir le conflit à l’heure actuelle ?
E. S. : Le besoin le plus urgent pour les journalistes est l’équipement de protection. Malheureusement, un grand nombre d’entre eux ne disposaient pas d’un tel équipement lorsque l’invasion a commencé, y compris plusieurs collègues qui travaillent pour des organisations de médias européennes. La FIJ a dû distribuer des gilets pare-balles provenant de son stock à des collègues qui n’en avaient pas lorsqu’ils sont partis en Ukraine. Grâce au soutien de l’UNESCO, nous espérons pouvoir fournir 110 autres gilets pare-balles dans les prochains jours.
Qu’en est-il des journalistes russes qui tentent de fuir la Russie ? Disposons-nous d’une estimation du nombre de professionnels des médias en fuite ? De quelle manière la FIJ et la FEJ les aident-elles ?
E. S. : Nous avons connaissance d’au moins 35 journalistes russes qui se sont réfugiés en Turquie et dans les pays voisins. La FIJ et la FEJ demandent aux pays de l’UE de faciliter l’obtention de visas dans la zone Schengen pour leurs collègues russes et tentent de soutenir ceux et celles qui sont dans le besoin à Istanbul et à Tbilissi. Nous discutons avec d’autres organisations pour déterminer les meilleurs moyens de fournir cette aide.
Certains de nos affiliés ont pris des initiatives individuelles pour aider directement l’Ukraine via l’IMTUU et le NUJU. Que conseilleriez-vous aux syndicats qui souhaitent adopter cette approche ?
E. S. : Oui, notre affilié grec JUADN a pris de telles initiatives. Il a travaillé en coordination avec la FIJ et le SDP en Pologne ainsi qu’avec nos affiliés ukrainiens et a réussi à se rendre en Ukraine pour fournir de l’aide directement à ses collègues. C’était une marque de solidarité inspirante. Tout comme ce fut le cas pour celle-ci, de telles initiatives doivent toujours être organisées en collaboration avec les affiliés ukrainiens, la FIJ et la FEJ. De cette façon, nous pouvons fournir des informations sur la situation précise, sur les endroits où se rendre et séjourner, ainsi que sur les besoins exacts des journalistes en Ukraine.
Bruxelles, le 23 mars 2022.
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