Motion de la FEJ
A l’initiative du SNJ-CGT, la Fédération européenne des journalistes (FEJ) a voté le 10 octobre dernier une motion d’urgence, en soutien aux journalistes et aux travailleurs du Groupe Moniteur / Infopro Digital. A une semaine du congrès de l’Association des maires de France (AMF), qui se tient à partir du 16 novembre, porte de Versailles, événement majeur co-organisé par le Groupe Moniteur, il est nécessaire de rappeler le soutien solidaire des syndicats européens face aux difficultés subies par les salariés de cette entreprise, notamment les plus précaires, malgré le niveau indécent de bénéfices réalisé par cette entreprise, notamment grâce à de l’argent public.
Le Groupe Moniteur est une entreprise de presse spécialisée destinée aux professionnels de la construction, de l’architecture, de l’énergie et des collectivités territoriales, elle compte environ 380 salariés, dont une centaine de journalistes, elle emploie également chaque année plus de 200 journalistes à la pige, et c’est une filiale d’Infopro Digital, le plus grand acteur de la presse professionnelle en France et un des principaux acteurs en Europe, avec des revues et des événements en Allemagne, Belgique, Angleterre, Espagne, Portugal et Russie.
Après un mouvement social digital organisé par des journalistes pigistes spécialisés, et soutenus sur les réseaux sociaux par la FEJ et plusieurs syndicats européens d’Espagne, Belgique, Allemagne, Croatie, Pays-Bas, Suisse, Suède, Danemark, pour réclamer la revalorisation des barèmes de piges, inchangés depuis dix ans, malgré d’importants bénéfices réalisés, l’entreprise ne répond pas favorablement aux demandes des journalistes les plus précaires et durcit le ton contre tous les salariés depuis septembre.
- Le 14 septembre dernier, le Groupe Moniteur a été condamné par le conseil de prud’hommes de Chartres pour n’avoir pas respecté les droits d’un journaliste pigiste. Le SNJ-CGT s’est constitué intervenant volontaire et a également gagné au nom de la profession. La direction a décidé le 30 septembre dernier de faire appel, montrant ainsi qu’elle n’a aucune considération pour la loi Cressard, qui reconnaît la présomption de salariat aux journalistes pigistes en France, et qu’il lui importe peu de payer, car les sommes sont dérisoires à côté de ses bénéfices.
- Le 15 septembre dernier, la société a été également condamnée par un tribunal de référés, pour ne pas donner accès aux élus du comité économique et social aux chiffres stratégiques, financiers et sociaux, prévus par la loi.
- Durant la négociation en cours sur un nouvel accord sur les droits d’auteur, la direction a fait entendre le 5 octobre dernier, qu’elle ne comptait pas partager avec les journalistes les droits de reprographie et de reproduction numérique, alors qu’elle perçoit environ 1 million d’euros chaque année à ce titre.
- Une expertise sur les risques psycho-sociaux est également en cours, le rapport final est attendu avant la fin du mois, mais les élus du personnel du conseil économique et social ont déjà fait état auprès de la direction de la souffrance dont témoignent les salariés à cause des pressions managériales. Un accord télétravail pour l’ensemble du groupe Infopro Digital a été signé, mais de nombreux salariés ont déjà fait part des difficultés sur son application, notamment en ce qui concerne l’équilibre entre la vie personnelle et professionnelle.
La société Groupe Moniteur réalise des bénéfices de plus de 25 millions d’euros en moyenne, elle a accumulé plus de 180 millions d’euros depuis 2014, elle a bénéficié également de plus de 2 millions d’euros de réductions de cotisations sociales, ainsi que d’aides de soutien à cause de la crise du Covid-19.
La Fédération européenne de journalistes, réunie en assemblée générale à Zagreb, les 9 et 10 octobre, apporte tout son soutien aux journalistes et à tous les salariés du Groupe Moniteur.
Nous demandons que la direction de l’entreprise respecte les lois, et notamment qu’elle reconnaisse le statut de salarié des journalistes rémunérés à la pige, tel qu’il est prévu dans la loi française. Tous les salariés ont droit à la négociation collective.
Nous demandons à l’Éditeur de rétribuer les droits d’auteurs, sans que cela empiète sur un partage juste et équitable des droits de reprographie et reproduction numérique.
Nous appelons le gouvernement français, et notamment le ministère du Travail, à prendre les mesures nécessaires pour faire respecter la loi. Il n’est pas acceptable que chaque salarié soit contraint de saisir les tribunaux pour faire respecter ses droits.
Nous rappelons à l’actionnaire principal, le fonds d’investissement Towerbrook, qu’il doit faire respecter sa propre déclaration de propriété responsable qui indique notamment qu’ils « aident les entreprises de leur portefeuille à développer les meilleures pratiques en matière de conditions de travail, y compris la santé, la sécurité et le bien-être de leurs employés, leurs structures de compensation et leurs pratiques de rémunération ».
Nous apportons toute notre solidarité et notre soutien aux journalistes et aux travailleurs de cette entreprise, car leur lutte pour défendre leurs droits concerne tous les salariés et tous les journalistes, en France et en Europe.
Zagreb, le 10 octobre 2021.
Lire les différentes résolutions sur le site de la FEJ