Plus de 100 invités venus de 70 pays et appartenant à 90 organisations différentes : avant l’ouverture du 52e congrès de la CGT ce lundi à Dijon, le dimanche a été consacré à la Journée internationale. Au programme, quatre tables rondes sur les inégalités dans le monde, les révolutions du travail, le rôle et les missions du syndicalisme, le centenaire de l’OIT.
Si il est impossible de résumer tous les débats, on peut au moins retenir quelques images. Par exemple celle de l’Iranien Reza Shahabi, syndicaliste à la régie des transports de Téhéran, qui a bien failli ne pas pouvoir se rendre à Dijon. Arrêté avec une trentaine d’autres personnes lors de la manifestation du 1er mai dans la capitale iranienne, il n’a été libéré que la veille de son départ.
L’Iranien Reza Shahabi, syndicaliste à la régie des transports de Téhéran, a bien failli ne pas pouvoir se rendre à Dijon. Arrêté avec une trentaine d’autres personnes lors de la manifestation du 1er mai dans la capitale iranienne, il n’a été libéré que la veille de son départ.
Une situation dont il a malheureusement l’habitude, puisque sur ces dix dernières années, il en a passé six en prison. Dans son pays, dénonce-t-il, militer dans un syndicat se fait « au prix de grands sacrifices » : emprisonnements, mandats d’arrêt, licenciements… Lui même a été « licencié il y a dix ans pour [ses] activités syndicales ».
On retiendra aussi le témoignage de la Guinéenne Asmaou Bah, qui se bat pour les droits des travailleurs domestiques. « J’ai moi-même travaillé comme travailleuse domestique pendant 12 ans, cela n’a pas été facile », confie Asmaou Bah, évoquant « la violence, le harcèlement, la non-déclaration à la caisse de protection sociale… » Les travailleurs domestiques sont 67 millions dans le monde, dont 80% de femmes, 50% de travailleurs informels et 17% de travailleurs migrants, énumère-t-elle. Comme d’autres oratrices, elle a regretté le manque de femmes dans les tables rondes de la journée. « Nous devons donc nous-mêmes montrer l’exemple », en bataillant pour les droits de ces femmes exploitées, conclut-elle.
« Les 1% les plus riches se sont appropriés 27% de la croissance économique ces 30 dernières années » et « 49% des émissions de CO2 sont le fait des 10% les plus riches ».
L’introduction de la première table ronde, assurée par l’économiste Thomas Coutrot, a permis de poser certains enjeux. Ainsi, « les 1% les plus riches se sont appropriés 27% de la croissance économique ces 30 dernières années » et « 49% des émissions de CO2 sont le fait des 10% les plus riches ». « Les défis sont sans équivalent », insiste-t-il, « au point que la possibilité d’une vie décente sur terre est en jeu ».
Thomas Coutrot a également mis en parallèle « l’explosion du tourisme international » pour les plus riches et, pour les plus pauvres, « une augmentation beaucoup plus modérée du nombre de migrants ». Des migrations dont les premières causes sont climatiques. Autre réalité mise en avant par l’économiste : la « polarisation du marché du travail », avec aux deux extrêmes « une augmentation des emplois hautement qualifiés », mais aussi des « emplois peu payés, occupés par des femmes, des migrants, notamment dans les services à la personne ».
Thomas Coutrot pointe des « épidémies » liées au travail, « troubles musculo-squelettiques, burn-out, cancers… », rappelant que selon l’OIT on compte trois millions de morts par an liés au travail.
Thomas Coutrot pointe des « épidémies » liées au travail, « troubles musculo-squelettiques, burn-out, cancers… », rappelant que selon l’OIT on compte trois millions de morts par an liés au travail. L’économiste observe cependant que, loin de la résignation, « de très fortes résistances sociales contre les inégalités et le déclin de la démocratie » s’organisent depuis 2011 : les indignés en Espagne, les mouvements « Occupy », les Gilets jaunes en France… « Le “travail vivant” pourrait être une trame de lecture commune à ces différents mouvements, note-t-il. Le travail, c’est d’abord et avant tout de la créativité, de la coopération… Cela ne peut pas être standardisé. Le travail sert à gagner sa vie mais aussi à être utile. »
Cette journée internationale a surtout mis en avant la nécessaire solidarité. Alors que « la précarité est devenue la norme dans le monde du travail », une solidarité internationale suppose que « les syndicats soient un levier fort pour mettre en lien les groupes les plus forts avec les plus faibles », note ainsi Unai Calvo Sordo, secrétaire général des CCOO (Espagne), évoquant les travailleurs les plus précarisés. La réplique la plus ovationnée de la journée est d’ailleurs celle qu’a faite en français l’Iranien Reza Shahabi : « Vive la solidarité internationale ! »