Ies JRI arrachent des embauches

0  -  Article mis à jour le 28 août 2017

En novembre, la grève très suivie des JRI de France 2 a permis d’obtenir neuf intégrations de CDD en CDI. Le mouvement a également posé la question du contenu de l’information à France Télévisions, mais aussi des effets à long terme des nouveaux moyens de transmission.
Par Claude Gueneau*

Trois semaines de négociations et quatre jours de grève avec le soutien de l’ensemble des syndicats…
Début novembre, les JRI (journalistes reporteurs d’image) de France 2 ont laissé les caméras au placard.
Le mouvement, suivi à 95 %, témoigne d’une forte mobilisation dans une rédaction qui a souvent été rétive à la grève. Une détermination motivée par une lente et régulière dégradation des conditions de travail, mais aussi et surtout par la perte de sens du métier.
Les JRI sont de plus en plus utilisés comme collecteurs d’éléments pour des sujets fabriqués à plusieurs mains et de moins en moins comme des journalistes

Abus sur l’amplitude de travail
Le déclencheur a d’abord été la baisse des effectifs et le non-remplacement des absents pour maladie, un sous-effectif chronique aux multiples conséquences. D’abord, des journées de travail à rallonge, avec des départs tôt le matin et des retours tardifs, cinq jours par semaine. Alors que les JRI de France 3 ont réussi à imposer la semaine de quatre jours, le recours au forfait jours à France 2 a laissé la porte ouverte à tous les abus en matière d’amplitude de travail. Trop peu nombreux, les JRI de France 2 sont aussi cantonnés à la couverture de l’actualité immédiate, au détriment des reportages et des magazines. Quand ils se sont rendu compte que la direction externalisait les magazines vers des boîtes de production, la coupe était pleine. Il a fallu quatre jours de grève pour que la direction accepte de créer neuf postes (des CDD intégrés en CDI), de maintenir un volant de renforts pigistes et s’engage à garantir 60 % à 70 % de production interne pour les magazines de la rédaction.

TVU Pack : quels effets sur la santé ?
L’autre point de conf lit a été l’utilisation des TVU Pack, ces nouveaux moyens de diffusion en 4G qu’on porte dans un sac à dos.
« TVU Pack nous a été imposé à marche forcée et sans débat », ont dit les grévistes. Une charge supplémentaire pour une équipe de tournage souvent réduite à deux personnes, en plus de la caméra, du trépied, des micros, de la voiture à conduire. Une nouvelle responsabilité et une nouvelle tâche aussi : qui assure la diffusion ? Pourquoi serait-ce le JRI ? Est-ce au JRI de tourner les plateaux en direct ?
En parallèle, certains grévistes ont soulevé la question de la finalité éditoriale. La diffusion en direct, ou très peu de temps après le tournage, modifie profondément le travail des journalistes et aggrave la taylorisation. On tourne et on envoie de plus en plus vite des éléments qui seront montés à distance par d’autres journalistes. Les équipes de terrain enchaînent la collecte d’éléments et voient la maîtrise de leur travail leur échapper.

Questions sur la 4G
Solidaires, les JRI de France 3 ont, de leur côté, mis en avant la question de l’exposition du corps humain aux ondes électromagnétiques.
Ces nouveaux moyens de diffusion peuvent comporter jusqu’à huit cartes 4G. Ce n’est pas parce que « c’est moderne et que BFM  l’utilise », comme l’a affirmé un DRH, qu’on peut les manipuler sans formation et dans n’importe quelles conditions. Le SNJ-CGT et le SNRT-CGT ont élargi le débat : quand, sur le lieu d’un reportage, comme par exemple une conférence de presse, France Télévisions, TF1, BFM, iTélé et les autres émettent toutes en même temps via la 4G, a-t-on mesuré les risques pour la santé de cette exposition massive aux rayonnements ? Sur l’utilisation des TVU Pack, le conflit n’a pas permis de trouver un accord. Les CHSCT sont saisis. L’un des mérites de cette grève est que les JRI ont posé les questions qui concernent l’ensemble des salariés et des journalistes des rédactions : la santé, l’organisation du travail, la définition des métiers, l’éditorial…

* Journaliste à la rédaction nationale de France 3,
membre du bureau du SNJ-CGT de France Télévisions.

Un article paru dans « Témoins n° 60 », la revue du Syndicat National des Journalistes CGT (Snj-CGT)

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